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    Les compétences interactionnelles des enfants bilingues et monolingues avec et sans troubles du développement du langage
    (Neuchâtel, 2021)
    De nos jours, le bilinguisme est un phénomène largement répandu dans le monde. Pour différentes raisons (politiques, économiques, etc.), un nombre croissant d’individus utilisent deux ou plusieurs langues pour communiquer (Grosjean, 2015). Parmi ceux-ci se trouvent un certain nombre d’enfants. Ces derniers acquièrent le langage à travers l’interaction avec leur entourage (Vygotski, 1934/1985), comme leurs pairs monolingues (de Weck et Marro, 2010). Cependant, certaines caractéristiques des interactions des individus bilingues sont différentes de celles observées chez les monolingues, il s’agit donc d’éléments spécifiques aux interactions bilingues. Si l’enfant bilingue au cours de ses premières années de vie manifeste des difficultés dans le développement du langage, la question de l’évaluation du langage en logopédie se pose (Kohnert, 2010). Dans ce type de situation, le logopédiste se voit exposé à des problèmes principaux comme, distinguer, parmi les difficultés de ces enfants celles qui relèvent d’un trouble du développement du langage (TDL dorénavant) de celles qui constituent un problème d’apprentissage de la langue seconde (Armon-Lotem, 2012). Un deuxième défi du logopédiste est d’évaluer les compétences langagières d’un enfant dans une langue non connue et de choisir des modes d’évaluation adéquats, compte tenu du fait que le sujet bilingue ne peut pas être considéré comme la somme de deux monolingues, selon les recherches scientifiques (p. ex. Estienne et Vander-Linden, 2014). Afin de réaliser une évaluation du langage appropriée aux enfants bilingues avec un TDL, la littérature montre, à l’heure actuelle, une augmentation de travaux qui analysent le langage des enfants bilingues avec et sans difficultés (d’un point de vue structural p. ex. Chiat, 2015 ; d’un point de vue discursif/narratif p. ex. Rezzonico et al., 2015). Cependant, nous remarquons des lacunes dans la littérature, en particulier concernant l’analyse des capacités interactionnelles et pragmatiques des enfants bilingues ayant un développement du langage typique et atypique. De plus, les réflexions sur les TDL, le bilinguisme et l’évaluation logopédique restent restreintes à certaines combinaisons de langues incluant l’anglais (p. ex. Bedore et al., 2006). Cela crée, par conséquent, une impasse pour le traitement logopédique dans les pays où les combinaisons de langues à traiter sont différentes, et lorsque le logopédiste ne parle pas la langue première de l’enfant. Pour cette raison, cette thèse vise à vérifier s’il y a la possibilité de détecter des aspects interactionnels qui permettent de différencier les enfants monolingues et bilingues avec ou sans TDL. Dans cette étude menée en Suisse romande, nous avons observé des enfants de 5;6 à 7;9 ans monolingues francophones et bilingues français-portugais (voir recensements de l’Office Fédéral de la Statistique, 2017 concernant la prévalence de population lusophone en Suisse romande) avec et sans TDL lors d’un jeu de « devinettes » avec leur mère et avec un interlocuteur inconnu (francophone et lusophone pour la population d’enfants bilingues). Cette activité nous a permis d’analyser les ressources interactionnelles que les enfants mettent en jeu avec deux types d’interlocuteurs, en outre pour les bilingues dans des langues différentes. A travers l’analyse de nos données nous avons pu constater des différences entre les groupes d’enfants concernant la dimension interactionnelle et les compétences pragmatiques. En ce qui concerne la dimension interactionnelle, nos résultats montrent des spécificités dans l’utilisation de la modalité non-verbale de la part des enfants bilingues. Certaines des compétences pragmatiques semblent être influencées par le statut linguistique des enfants avec TDL. Sur le plan qualitatif, nous avons analysé plus en profondeur les caractéristiques des enfants bilingues avec TDL en interaction avec l’interlocuteur inconnu francophone. Nous avons également relevé des spécificités concernant le style interactionnel des dyades mères-enfants. Par exemple, les mères des enfants bilingues ont exploité les ressources linguistiques liées à leur statut de bilingues (p. ex. possibilité d’alterner les langues ou de négocier la langue d’interaction) pour étayer leur enfant afin de permettre à la tâche de continuer. De manière générale, cette recherche nous a permis d’enrichir la discussion théorique sur le développement des capacités interactionnelles chez les enfants bilingues avec et sans TDL en comparaison à leurs pairs monolingues et d’élargir le panorama linguistique des études sur cette thématique à une nouvelle combinaison de langues (français-portugais). Nos résultats montrent des spécificités des interactions bilingues qui méritent d’être prises en compte dans les recherches futures portant sur le bilinguisme et les TDL. Ces éléments fourniront également des pistes cliniques pour l’évaluation des enfants bilingues. Abstract Nowadays, bilingualism is a widespread phenomenon in the world. For various reasons (political, economic, etc.), an increasing number of people use two or more languages to communicate (Grosjean, 2015). Among these are a number of children. Bilingual children acquire language through interaction with their environment (Vygotski, 1934/1985), as do their monolingual peers (de Weck & Marro, 2010). However, some features of the interactions of bilingual individuals are different from those observed in monolinguals, so these are specific to bilingual interactions. If the bilingual child in the early years of life shows difficulties in language development, the question of language assessment in speech-language pathology arises (Kohnert, 2010). In this type of situation, the speech-language therapist is confronted with major problems such as distinguishing among the difficulties of these children those that are due to a developmental language disorder (DLD now) from those that constitute a second language learning problem (Armon-Lotem, 2012). A second challenge for the speech-language pathologist is to assess a child's language proficiency in an unfamiliar language and to choose appropriate assessment methods, given that the bilingual subject cannot be considered the sum of two monolinguals, according to scientific research (e.g., Estienne and Vander-Linden, 2014). In order to perform an appropriate language assessment for bilingual children with DLD, the literature currently indicates an increase in work that analyses the language of bilingual children with and without difficulties (from a structural perspective e.g. Chiat, 2015; from a discursive/narrative perspective e.g. Rezzonico et al., 2015). However, we do notice some gaps in the literature, especially regarding the analysis of the interactional and pragmatic skills of bilingual children with typical and atypical language development. Moreover, thinking about DLD, bilingualism and speech and language assessment remains restricted to certain language combinations including English (e.g., Bedore et al., 2006). This creates, therefore, an impasse for speech and language therapy in countries where the language combinations to be covered are different, and where the speech and language therapist does not speak the child's first language. For this reason, the aim of this PhD thesis is to test whether there is a possibility to detect interactional aspects that help to differentiate between monolingual and bilingual children with or without TDL. In this study conducted in French-speaking Switzerland, we observed monolingual French-speaking and bilingual French-Portuguese children aged 5;6 to 7;9 (see Federal Statistical Office censuses, 2017 concerning the prevalence of the Portuguese-speaking population in French-speaking Switzerland) with and without DLD during a "guessing game" with their mother and with an unknown interlocutor (French-speaking and Portuguese-speaking for the population of bilingual children). This activity enabled us to analyse the interactional skills that children bring into play with two types of interlocutor, also for bilinguals in different languages. Through the analysis of our data we were able to observe differences between groups of children concerning the interactional dimension and pragmatic skills. As far as the interactional dimension is concerned, our results show specificities in the use of the non-verbal modality by bilingual children. Some of the pragmatic skills seem to be influenced by the linguistic status of the children with DLD. Qualitatively, we further analysed the characteristics of bilingual children with DLD in interaction with the unknown francophone interlocutor. We also found specificities regarding the interactional style of the mother-child dyads. For example, the mothers of bilingual children used language resources related to their bilingual status (e.g., the possibility of alternating languages or negotiating the language of interaction) to support their child in order to keep the task going. Overall, this research has allowed us to enrich the theoretical discussion on the development of interactional skills in bilingual children with and without DLD compared to their monolingual peers and to broaden the linguistic panorama of studies on this topic to a new language combination (French-Portuguese). Our results show specificities of bilingual interactions that deserve to be taken into account in future research on bilingualism and DLD. These elements will also provide clinical leads for the language assessment of bilingual children.